Associée depuis ses débuts aux métropoles occidentales, du Dusseldorf de Kraftwerk à la techno de Detroit, la musique électronique ne serait-elle à même de s'épanouir qu'à l'ombre des gratte-ciels ? N'y a t-il point de salut pour les sonorités numériques loin des périphériques ? Pour son premier album chez Raster-Noton (mais le dixième en réalité), Sasu Ripatti, alias Vladislav Delay, qui a quitté depuis quelques années déjà l'agitation berlinoise pour les forêts de sa Finlande natale, où il a construit, partiellement de ses mains, son nouveau studio, entend pourtant évoquer le paysage finlandais, sans recourir aux recettes free folk qui font florès dans son pays, sans même laisser l'omniprésence d'une nature toute proche lui laisser guider sa palette sonore. Dense, Vantaa regorge d'ambiances complexes, et s'il s'ouvre sur des ambiances dub et cosmiques, équivalent sonore de la contemplation d'un ciel nocturne durant une nuit d'hiver (« Luotasi »), Vantaa développe bientôt des résonances plus traitres, des présences inconnues guettant à l'orée de nos perceptions (« Lipite »), avant de glisser peu à peu, de manière très graduelle, vers l'oppression de «Lauma » et de son rythme aliénant, à la fois tribal, primitif, et totalement désincarné et de revenir à des climats plus sereins et organiques (« Levite »). Musique de la pierre, du vent, du bois, des corps, mais intégrés, fusionnés à la machine, recombinés sous forme d'algorithmes, Vantaa pose les bases d'une nouvelle nature, dont on espère que Vladislav Delay développera vite les principes fondateurs dans une série d'albums à venir pour le label allemand.