Bérangère Maximin par Jean-François Micard
Au croisement des mondes, Bérangère Maximin marche en funambule entre la musique concrète de l'école GRM / IRCAM et la musique électronique expérimentale. Artiste hors normes, et à l'aise semble t-il partout, elle a commencé par sortir d'emblée son premier album sur Tzadik, le prestigieux label de John Zorn, avant d'opter pour Sub Rosa pour un nouvel album, No One is an Island fait de collaborations avec un panel étendu de musiciens multiformes. Ouvrant son monde à tous ces apports, Bérangère Maximin y tisse des morceaux polychromes qui tirent le meilleur de ce mélange des genres. Une vraie et belle découverte que nous partageons aujourd'hui.
Pour commencer, peux-tu nous résumer ton parcours musical ? Comment en es-tu arrivée à la musique acousmatique ?
Bérangère Maximin : C’est une drôle d’entrée en matière mais on pourrait dire que je suis un produit de l’éducation nationale, en quelque sorte. C’est un professeur de musique au collège qui a le premier détecté un potentiel. Je traversais alors une période adaptation à la Métrople, après avoir quitté l’Ile de la Réunion avec ma famille. J’ai alors commencé à participer aux diverses activités musicales proposées. Au passage au lycée, ce même professeur m’a orienté vers sa classe spécialisée en musique. J’avais dix sept ans lorsqu’un ami m’a fait écouter Symphonie pour un homme seul de Pierre Schaeffer et Pierre Henry ainsi que d’autres oeuvres de ce répertoire. J’ai été intriguée par ces assemblages de sons originaux qui oscillaient entre la musique et la dramatique radiophonique, comme je pourrais le formuler aujourd’hui. J’ai eu la sensation d’avoir trouvé ce que je cherchais, un déclic mystérieux. Quelques mois plus tard, Denis Dufour ouvrait sa classe au conservatoire, et après mes études avec lui, il m’a proposé de l’assister au sein de son association parisienne Motus. N’ayant cessé de composer tout ce temps, en 2008, je me suis sentie suffisamment prête pour proposer mes travaux à un label.
Il semble que tu évolues à la croisée des mondes entre la recherche musicale pure type GRM et des choses plus improvisées, avec également un côté "spectacle" mais également de la création radiophonique. Est-ce une place qui te convient ?
Tout à fait. Je suis à l’aise avec mes outils de création et avec le temps, j’apprends à mieux m’organiser et à avoir des idées spécifiques pour chaque proposition. Les deux pratiques que sont l’improvisation avec des instrumentistes et des collègues compositeurs électroniques et le travail sur les matières en studio, relèvent toutes deux du domaine de l’expérimentation. J’ai une éthique personnelle et tiens à garder le contrôle sur mes productions. Ceci dit, il est vrai que je tiens aussi à rester ouverte d’esprit et continuer de collaborer avec des musiciens de genres divers et de personnalité forte. Je continue de préférer le terme de « concert » à celui de « spectacle » car la plupart du temps, je suis seule sur scène avec mes machines et ma voix, sans réelle mise en scène. La plupart de mes sets sont purement musicaux en définitive.
On te présente comme l’étoile montante de la musique acousmatique. Ça te flatte ou ça t’embarrasse ?
Cela me flatte bien sûr (rires). Plus sérieusement, on m’a appris à me méfier des « buzzs » de ce genre. Fennesz par exemple qui était adulé en France il y a quelques années, est maintenant critiqué et on perçoit nettement le renversement de situation. C’est assez désagréable d’autant qu’il semble que cela soit plus lié à un besoin de nouveauté que le signe d’un épuisement artistique. Tout ce que je souhaite c’est de pouvoir faire des projets avec des moyens adéquats et que le public soit satisfait de ce qu’il vient voir.
Ton premier album était paru chez Tzadik, ce qui n’est quand même pas des plus courant pour une jeune compositrice. Comment cela s’était-il déroulé ?
Le plus simplement du monde, j’ai envoyé un CD et j’ai rapidement reçu une réponse positive de John Zorn. Les artistes qui travaillent avec lui le savent bien, il est concentré, rapide et sait parfaitement ce qu’il veut. Tout est allé vite, l’album est sorti cinq mois après nos premiers échanges.
Pour ton second album, tu as choisi de publier des collaborations. Qu’est ce qui t’a poussée en ce sens ?
Disons que c’est justement le fait d’être signée chez Tzadik qui m’a amené à recevoir des invitations à jouer en concert de la part des autres artistes du label. J’ai tenté l’expérience et j’ai compris que cette pratique plus musicienne engendrait des matières nouvelles. Comment s’en priver, une fois qu’on a fait ce constat ? J’ai un peu tourné en Europe et aux USA et à l’issue de cette période, j’ai souhaité fixer, écrire et travailler ce nouveau style développé sur la route. Une façon d’obtenir de la distance et ainsi mieux incorporer ces nouveaux paramètres à une démarche globale.
Comment as-tu choisi tes collaborateurs ? Et par la suite, comment se sont-elles déroulées ? En live ou par un échange de fichiers ? Y a-t-il eu une grande part d’improvisation dans ces rencontres ?
Je ne sais pas comment prendre la dernière question, mais disons que j’ai eu l’opportunité de les rencontrer dès mes premiers concerts. J’ai joué le même soir que Fennesz deux fois en un an et comme il apprécie ce que je fais et que nous nous entendons bien, il est allé de soit que nous travaillions ensemble. De même pour Frédéric D. Oberland, guitariste et compositeur avec lequel j’ai eu de nombreux échanges sur la musique et qui m’a invité à jouer à ses côtés à Paris à plusieurs reprises. Rhys Chatham a répondu favorablement à ma proposition de duo pour un one-off à Poitiers. Les répétitions et le concert se sont merveilleusement bien passés. Nous avions travaillé une longue pièce de deux mouvements et je me suis servie des enregistrements effectués dans ce cadre pour terminer la pièce qui apparaît sur le disque. Ce qui m’a conforté dans l’idée que j’étais capable d’aboutir ce projet, c’est ce qui s’est produit durant l’enregistrement avec Richard Pinhas. Nous avons improvisé un bon moment sur un tempo moyen. Vers la fin de la session, nous avons augmenté considérablement le tempo et tout s’est comme déclenché, déchaîné d’un coup. La prise est sur le disque quasi tel quel.
A l’exception de Rhys Chatham, tous tes autres collaborateurs sont avant tout guitaristes (même si comme Fennesz ils peuvent aussi utiliser largement l’électronique) et c’est d’ailleurs sur cet instrument que tu les utilise. Cela faisait-il partie de ton envie de départ ? d’être entourée de guitaristes avec chacun une personnalité très forte ?
Oui et non. Ce sont les organisateurs de concert qui, au départ, m’ont beaucoup programmé en me couplant avec des guitaristes solistes ou des groupes à prédominance de guitares (Fennesz, Rhys Chatham G3, James Blackshaw, Zu, Fred Frith, Gilles Laval, David Fenech, Jean-Marc Montera, Double Nelson, Skeletons…). Mais ce n’est que lorsque j’ai commencé à apprendre à jouer de l’instrument, il y a deux ans, que j’ai eu cette idée. J’avoue volontiers maintenant que l’envie de départ était purement égoïste. Initialement, c’était pour avoir des tuyaux sur les façons les plus originales d’utiliser l’instrument que j’ai proposé ces sessions. Et puis évidemment, les choses ont vite pris une tournure plus sérieuse. Le timing s’est avéré juste car j’ai alors réalisé qu’au regard de ma sensibilité, la guitare électro-acoustique était le parfait instrument pour compléter mes séquences électroniques. Les sons de guitares ont une patine, une gamme de timbres, un son qui s’incorporent à l’électronique de la meilleure façon, d’après moi.
En quoi est-ce que cet exercice de collaboration a-t-il changé ton approche de la composition ?
Matériellement, le fait d’avoir quelqu’un à ses côtés qui vient lier, compléter, rebondir, développer ses propres propositions, est libérateur car, lorsque cela se passe bien, sur l’instant un sentiment d’assurance, de confiance permet d’oser instinctivement des choses, de se dépasser en somme. Les effets sur la pensée musicale sont irrémédiables. Travailler avec ces talentueux guitaristes m’a aussi décomplexé totalement sur l’aspect mélodique d’une musique. J’ai travaillé à diverses combinaisons au mixage et ai pu écrire, arranger les pièces en me souciant de trouver le bon équilibre entre acoustique et électronique, tout en gardant un flou sur les rythmiques et les nappes en background.
Dans le futur, il me sera de plus en plus possible d’incorporer des instruments à mes séquences électroacoustiques en gardant intact le travail de mise en contrepoint et en espace si spécifiques à mes œuvres purement solo.
Tes lives se présentent largement plus comme des créations à part entière que comme des concerts à proprement parler (« Sheer Accident », « Stuck in a nasty little Film »…). Est-ce important pour toi d’en faire une expérience radicalement différente du disque ?
De plus en plus en effet. Il m’a fallu un peu de pratique pour le réaliser mais il est impossible de restituer mes travaux de studio sur scène. Néanmoins, je prends de plus en plus plaisir à m’auto-remixer et faire des mash-ups de travaux différents en mêlant séquences-jeux et bouts de pièces radiophoniques par exemple. Les lives ont des noms différents car les setlists sont bien distinctes. Je me construis un scénario personnel pour les composer et leur donne ensuite un nom.
Pourrais-tu envisager d’adapter les titres de No One is an Island pour la scène ?
Musicalement, ce serait tout à fait possible. C’est plus un problème matériel, car nous sommes tous très occupés et un plateau de cette taille ne se gère pas si facilement. Par contre, nous allons retravailler ensemble dans le futur, c’est sûr. Tous les invités du disque sont maintenant de vrais amis et ils ont apprécié de travailler avec moi. Je tiens à développer ce travail sur le long terme donc d’autres duos avec chacun d’entre eux sont à prévoir.
Peux-tu nous en dire un peu plus sur le duo que tu dois jouer avec Fred Frith à Paris en Juin ?
Fred Frith et moi nous sommes rencontrés au festival Sonore de Brest il y a deux ans. Il a pu écouter mon concert et m’a proposé de venir jouer à San Francisco dès que j’en aurais l’occasion. Ce qui n’a pas tardé. L’an dernier, je suis revenue aux USA avec la bourse Cultures France Hors Les Murs pour trois mois. Je me suis donc rendue à San Francisco de New York, où j’étais établie pendant le séjour. Etant donné que son ami Yan Jun était aussi présent sur le territoire à ce moment-là, Fred a alors décidé de monter un mini-festival avec en plus de nous trois, Bob Ostertag, Jeffrey Zeigler, Ryan G. Tallmann et Svetlana Voronina. Nous nous retrouvons donc un an plus tard, à Paris, pour une totale improvisation sur scène. Splendide !
As-tu d’autres projets en cours d’ici la fin de l’année ?
Je prépare une tournée solo en France et en Europe pour le dernier semestre de l’année. Cet été, je rentre en studio pour produire le prochain album du musicien Colin Johnco (Farewell Poetry, Dr(Dr)one, Prison Food Sucks, LEEP…), et juste avant cela, je dois composer une pièce pour le projet « Fukushima Open Sounds » que Dominique Balaÿ du site webSYNradio a initié en partenariat avec Christian Zanesi et l’INA GRM. D’autres projets sont également prévus à Paris à la rentrée.
http://www.berangeremaximin.com
Chronique
No One is an Island
Pour commencer, peux-tu nous résumer ton parcours musical ? Comment en es-tu arrivée à la musique acousmatique ?
Bérangère Maximin : C’est une drôle d’entrée en matière mais on pourrait dire que je suis un produit de l’éducation nationale, en quelque sorte. C’est un professeur de musique au collège qui a le premier détecté un potentiel. Je traversais alors une période adaptation à la Métrople, après avoir quitté l’Ile de la Réunion avec ma famille. J’ai alors commencé à participer aux diverses activités musicales proposées. Au passage au lycée, ce même professeur m’a orienté vers sa classe spécialisée en musique. J’avais dix sept ans lorsqu’un ami m’a fait écouter Symphonie pour un homme seul de Pierre Schaeffer et Pierre Henry ainsi que d’autres oeuvres de ce répertoire. J’ai été intriguée par ces assemblages de sons originaux qui oscillaient entre la musique et la dramatique radiophonique, comme je pourrais le formuler aujourd’hui. J’ai eu la sensation d’avoir trouvé ce que je cherchais, un déclic mystérieux. Quelques mois plus tard, Denis Dufour ouvrait sa classe au conservatoire, et après mes études avec lui, il m’a proposé de l’assister au sein de son association parisienne Motus. N’ayant cessé de composer tout ce temps, en 2008, je me suis sentie suffisamment prête pour proposer mes travaux à un label.
Il semble que tu évolues à la croisée des mondes entre la recherche musicale pure type GRM et des choses plus improvisées, avec également un côté "spectacle" mais également de la création radiophonique. Est-ce une place qui te convient ?
Tout à fait. Je suis à l’aise avec mes outils de création et avec le temps, j’apprends à mieux m’organiser et à avoir des idées spécifiques pour chaque proposition. Les deux pratiques que sont l’improvisation avec des instrumentistes et des collègues compositeurs électroniques et le travail sur les matières en studio, relèvent toutes deux du domaine de l’expérimentation. J’ai une éthique personnelle et tiens à garder le contrôle sur mes productions. Ceci dit, il est vrai que je tiens aussi à rester ouverte d’esprit et continuer de collaborer avec des musiciens de genres divers et de personnalité forte. Je continue de préférer le terme de « concert » à celui de « spectacle » car la plupart du temps, je suis seule sur scène avec mes machines et ma voix, sans réelle mise en scène. La plupart de mes sets sont purement musicaux en définitive.
On te présente comme l’étoile montante de la musique acousmatique. Ça te flatte ou ça t’embarrasse ?
Cela me flatte bien sûr (rires). Plus sérieusement, on m’a appris à me méfier des « buzzs » de ce genre. Fennesz par exemple qui était adulé en France il y a quelques années, est maintenant critiqué et on perçoit nettement le renversement de situation. C’est assez désagréable d’autant qu’il semble que cela soit plus lié à un besoin de nouveauté que le signe d’un épuisement artistique. Tout ce que je souhaite c’est de pouvoir faire des projets avec des moyens adéquats et que le public soit satisfait de ce qu’il vient voir.
Ton premier album était paru chez Tzadik, ce qui n’est quand même pas des plus courant pour une jeune compositrice. Comment cela s’était-il déroulé ?
Le plus simplement du monde, j’ai envoyé un CD et j’ai rapidement reçu une réponse positive de John Zorn. Les artistes qui travaillent avec lui le savent bien, il est concentré, rapide et sait parfaitement ce qu’il veut. Tout est allé vite, l’album est sorti cinq mois après nos premiers échanges.
Pour ton second album, tu as choisi de publier des collaborations. Qu’est ce qui t’a poussée en ce sens ?
Disons que c’est justement le fait d’être signée chez Tzadik qui m’a amené à recevoir des invitations à jouer en concert de la part des autres artistes du label. J’ai tenté l’expérience et j’ai compris que cette pratique plus musicienne engendrait des matières nouvelles. Comment s’en priver, une fois qu’on a fait ce constat ? J’ai un peu tourné en Europe et aux USA et à l’issue de cette période, j’ai souhaité fixer, écrire et travailler ce nouveau style développé sur la route. Une façon d’obtenir de la distance et ainsi mieux incorporer ces nouveaux paramètres à une démarche globale.
Comment as-tu choisi tes collaborateurs ? Et par la suite, comment se sont-elles déroulées ? En live ou par un échange de fichiers ? Y a-t-il eu une grande part d’improvisation dans ces rencontres ?
Je ne sais pas comment prendre la dernière question, mais disons que j’ai eu l’opportunité de les rencontrer dès mes premiers concerts. J’ai joué le même soir que Fennesz deux fois en un an et comme il apprécie ce que je fais et que nous nous entendons bien, il est allé de soit que nous travaillions ensemble. De même pour Frédéric D. Oberland, guitariste et compositeur avec lequel j’ai eu de nombreux échanges sur la musique et qui m’a invité à jouer à ses côtés à Paris à plusieurs reprises. Rhys Chatham a répondu favorablement à ma proposition de duo pour un one-off à Poitiers. Les répétitions et le concert se sont merveilleusement bien passés. Nous avions travaillé une longue pièce de deux mouvements et je me suis servie des enregistrements effectués dans ce cadre pour terminer la pièce qui apparaît sur le disque. Ce qui m’a conforté dans l’idée que j’étais capable d’aboutir ce projet, c’est ce qui s’est produit durant l’enregistrement avec Richard Pinhas. Nous avons improvisé un bon moment sur un tempo moyen. Vers la fin de la session, nous avons augmenté considérablement le tempo et tout s’est comme déclenché, déchaîné d’un coup. La prise est sur le disque quasi tel quel.
A l’exception de Rhys Chatham, tous tes autres collaborateurs sont avant tout guitaristes (même si comme Fennesz ils peuvent aussi utiliser largement l’électronique) et c’est d’ailleurs sur cet instrument que tu les utilise. Cela faisait-il partie de ton envie de départ ? d’être entourée de guitaristes avec chacun une personnalité très forte ?
Oui et non. Ce sont les organisateurs de concert qui, au départ, m’ont beaucoup programmé en me couplant avec des guitaristes solistes ou des groupes à prédominance de guitares (Fennesz, Rhys Chatham G3, James Blackshaw, Zu, Fred Frith, Gilles Laval, David Fenech, Jean-Marc Montera, Double Nelson, Skeletons…). Mais ce n’est que lorsque j’ai commencé à apprendre à jouer de l’instrument, il y a deux ans, que j’ai eu cette idée. J’avoue volontiers maintenant que l’envie de départ était purement égoïste. Initialement, c’était pour avoir des tuyaux sur les façons les plus originales d’utiliser l’instrument que j’ai proposé ces sessions. Et puis évidemment, les choses ont vite pris une tournure plus sérieuse. Le timing s’est avéré juste car j’ai alors réalisé qu’au regard de ma sensibilité, la guitare électro-acoustique était le parfait instrument pour compléter mes séquences électroniques. Les sons de guitares ont une patine, une gamme de timbres, un son qui s’incorporent à l’électronique de la meilleure façon, d’après moi.
En quoi est-ce que cet exercice de collaboration a-t-il changé ton approche de la composition ?
Matériellement, le fait d’avoir quelqu’un à ses côtés qui vient lier, compléter, rebondir, développer ses propres propositions, est libérateur car, lorsque cela se passe bien, sur l’instant un sentiment d’assurance, de confiance permet d’oser instinctivement des choses, de se dépasser en somme. Les effets sur la pensée musicale sont irrémédiables. Travailler avec ces talentueux guitaristes m’a aussi décomplexé totalement sur l’aspect mélodique d’une musique. J’ai travaillé à diverses combinaisons au mixage et ai pu écrire, arranger les pièces en me souciant de trouver le bon équilibre entre acoustique et électronique, tout en gardant un flou sur les rythmiques et les nappes en background.
Dans le futur, il me sera de plus en plus possible d’incorporer des instruments à mes séquences électroacoustiques en gardant intact le travail de mise en contrepoint et en espace si spécifiques à mes œuvres purement solo.
Tes lives se présentent largement plus comme des créations à part entière que comme des concerts à proprement parler (« Sheer Accident », « Stuck in a nasty little Film »…). Est-ce important pour toi d’en faire une expérience radicalement différente du disque ?
De plus en plus en effet. Il m’a fallu un peu de pratique pour le réaliser mais il est impossible de restituer mes travaux de studio sur scène. Néanmoins, je prends de plus en plus plaisir à m’auto-remixer et faire des mash-ups de travaux différents en mêlant séquences-jeux et bouts de pièces radiophoniques par exemple. Les lives ont des noms différents car les setlists sont bien distinctes. Je me construis un scénario personnel pour les composer et leur donne ensuite un nom.
Pourrais-tu envisager d’adapter les titres de No One is an Island pour la scène ?
Musicalement, ce serait tout à fait possible. C’est plus un problème matériel, car nous sommes tous très occupés et un plateau de cette taille ne se gère pas si facilement. Par contre, nous allons retravailler ensemble dans le futur, c’est sûr. Tous les invités du disque sont maintenant de vrais amis et ils ont apprécié de travailler avec moi. Je tiens à développer ce travail sur le long terme donc d’autres duos avec chacun d’entre eux sont à prévoir.
Peux-tu nous en dire un peu plus sur le duo que tu dois jouer avec Fred Frith à Paris en Juin ?
Fred Frith et moi nous sommes rencontrés au festival Sonore de Brest il y a deux ans. Il a pu écouter mon concert et m’a proposé de venir jouer à San Francisco dès que j’en aurais l’occasion. Ce qui n’a pas tardé. L’an dernier, je suis revenue aux USA avec la bourse Cultures France Hors Les Murs pour trois mois. Je me suis donc rendue à San Francisco de New York, où j’étais établie pendant le séjour. Etant donné que son ami Yan Jun était aussi présent sur le territoire à ce moment-là, Fred a alors décidé de monter un mini-festival avec en plus de nous trois, Bob Ostertag, Jeffrey Zeigler, Ryan G. Tallmann et Svetlana Voronina. Nous nous retrouvons donc un an plus tard, à Paris, pour une totale improvisation sur scène. Splendide !
As-tu d’autres projets en cours d’ici la fin de l’année ?
Je prépare une tournée solo en France et en Europe pour le dernier semestre de l’année. Cet été, je rentre en studio pour produire le prochain album du musicien Colin Johnco (Farewell Poetry, Dr(Dr)one, Prison Food Sucks, LEEP…), et juste avant cela, je dois composer une pièce pour le projet « Fukushima Open Sounds » que Dominique Balaÿ du site webSYNradio a initié en partenariat avec Christian Zanesi et l’INA GRM. D’autres projets sont également prévus à Paris à la rentrée.
http://www.berangeremaximin.com
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No One is an Island